Dopo aver pubblicato la versione tradotta in italiano, abbiamo deciso di fare altrettanto con quella originale in lingua madre. Affinchè Oltralpe, e non solo considerando la diffusione della lingua francese, abbiano la possibilità di leggerla.
– On commence avec les presentations: tu es le president de l’ANS. C’est quoi l’ANS exactement? Quand, où et pourquoi a t’elle été créée?
L’Association Nationale des Supporters a été créée en Juillet 2014 suite à une réunion regroupant la plupart des groupes français. Cette association a pour but de :
- Fédérer l’ensemble des associations françaises de supporters de football derrière une association commune
- Permettre l’union des différentes associations de supporters de football contre les mesures répressives touchant les supporters
- Permettre la défense administrative et judiciaire des supporters de football, membre des associations adhérentes, auprès des tribunaux compétents en la matière lors de mesures répressives suite à des actions organisées par l’association
- Permettre la défense administrative et judiciaire des associations adhérentes auprès des tribunaux compétents en la matière lors de mesures répressives suite à des actions organisées par l’association
- Permettre la défense des droits et des libertés fondamentales en tant que citoyens des supporters de football auprès des tribunaux compétents en la matière
- Permettre tout débats, échanges, discussions, entretiens et réunions avec les instances dirigeantes du football français et européen, avec toute association ou organisme lié au football ou à la défense des droits des citoyens, avec les Pouvoirs Publics et notamment les préfecture, avec les ministères et organisations dépendantes du Ministère de l’Intérieur et du Ministère des Droits des Femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports
- Participer à l’élaboration et la mise en place d’une politique d’accueil, de billetterie et de sécurité harmonisée
Aujourd’hui, celle-ci est composée d’une quarantaine de groupes et est en contact avec l’ensemble des groupes français.
– Tu es aussi l’un des reponsables des Red Tigers Lens, le groupe impliqué, il y a quelques semaines, dans les incidents au Havre. Que est-ce-qui s’est passé là-bas? Peux-tu revenir sur les évènements dès votre arrivée sur place?
Dans un premier temps, je me permets de revenir sur la préparation de ce déplacement. Afin d’éviter une interdiction, l’ensemble des associations de supporters lensoises et havraises ont co signé un courrier avec l’ANS, transmis à la préfecture, afin de proposer leurs expériences pour gérer au mieux cette rencontre. Un point de rendez-vous pour être escorter nous est transféré et ensuite un accord est trouvé avec les supporters du HAC pour se rendre en ville.
Le jour du match, 200 Red Tigers prennent la route à bord de deux bus. Nous respectons le point de rendez-vous afin d’être escorté. Première surprise, alors que d’autres bus sont déjà présent, seul les RT sont escortés avec un dispositif digne d’une escorte présidentielle. Nos bus se garent sur un parking et à notre descente nous prenons nos dispositions pour sortir afin de rejoindre les cafés pour patienter et passer du temps entre pote. Première réaction violente de la police qui repousse violement une fille puis les premiers qui souhaitent sortir de cet enclos, qui pour information, n’a pas de toilettes ou de lieu pour se restaurer.
Afin de patienter, une trentaine de mec s’amuse à chambrer gentiment la police en courant autour des grilles. La patience policière atteint ses limites, et ceux-ci commencent à balancer des gazs lacrymogènes alors que les supporters ne peuvent même pas les atteindre ou même sortir. Suite à ça, certains pétent un câble et c’est une guerilla urbaine pendant une trentaine de minutes. Nous relançons leurs projectiles et ce que nous trouvons sous la main, et ils répliquent à l’aveuglette (aucune visibilité avec les lacrymos balancé) avec leurs flashball. Des supporters ont dû effectué des gestes de premier secours, certains ont fait des malaises, d’autres ont été brulé par les lacrymos. La tension diminue, les portes du stade s’ouvrent 10 min avant le coup d’envoi alors que 1200 lensois attendent dehors, certains ne verront pas le début du match. Dans la file d’attente, les provocations policières continuent, 4 mecs se font arrêtés, ce qui provoque des affrontements dans les coursives du stade avec du matraquage à hauteur de visage. Nous prenons la décision de quitter le stade, la police refuse, ce qui engendre un pétage de câble, les gens arrachent des sièges et les jettent sur le terrain. Au final, ils nous laisseront sortir en deuxième mi-temps.
– Après le traquenard de Le Havre-Lens quelles sont les conséquences sur votre groupe ? Comment avez-vous réagit ?
Après le traquenard, un acharnement médiatique sur notre groupe a eu lieu. Les médias retiennent uniquement ce qu’ils ont vue : les sièges jetés sur le terrain. Malheureusement ce geste est une conséquence de la mauvaise organisation et de la provocation policière. Afin de traiter les gens comme des animaux, ils régissent en tant que tel.
Notre président, Gervais Martel, a décidé de désactiver nos abonnements, c’est 400 Tigers qui n’ont pas pu se rendre au match qui s’en est suivis à domicile. La décision a été prise d’aller supporter la CFA, et nous avons également refuser de se rendre à notre derby contre Valenciennes suite à la demande de Martel pour que l’on revienne. L’ensemble des associations lensoises ont suivis nos actions.
– Après les incidents lors du match Le Havre-Lens, il y a eu aussi le cas de Maxime, le supporter de Bastia qui a perdu un oeil suite à un tir de flahball. On a vu le comportament de la police lors de PSG-Chelsea (ils ont aspergé des supporters anglais de spray au poivre pendant leur celebration du but). Quels sont les pouvoirs et les moyens à disposition de la Police dans les stades en France? Sont-ils bien utilisés ou y-a-t-il des abus?
Les forces de l’ordre et les stadiers disposent d’important moyens pour maintenir l’ordre dans et autour des stades. On constate toutefois régulièrement un usage disproportionné de ces moyens.
Par exemple, depuis 2012, 3 supporters ont perdu un oeil suite à un tir de flash-ball aux abords d’un stade, après Florent, supporter montpelliérain et Alexandre, supporter lyonnais, c’est Maxime, supporter bastiais, qui a perdu le sien dans des circonstances encore à éclaircir.
Ce nouveau drame pose deux questions. La première concerne l’usage abusif et disproportionné du flash-ball par les forces de l’ordre contre des supporters. L’été dernier, l’IGPN et le Défenseur des Droits ont recommandé l’abandon de cette arme qui « n’est pas véritablement adaptée au maintien de l’ordre » (avis du Défenseur des Droits du 21 juillet 2015). Qu’attend-on pour en bannir définitivement l’emploi ? La seconde question concerne la récente escalade de la tension observée entre supporters et forces de l’ordre. Plusieurs groupes de supporters ont pu remarquer des fouilles et palpations exagérément musclées, des paroles méprisantes, impolies ou injurieuses à leur égard. Les retards pour rentrer en tribunes sont fréquents, parfois délibérés, et les flash-balls sont de sortie. La communication est rompue.
On peut aussi s’interroger sur la présence de policiers dans les stades. Normalement, cette mission est dévolue aux stadiers sous le contrôle de l’organisateur de la rencontre. Celui-ci ne doit pouvoir faire appel aux forces de l’ordre qu’en cas de trouble incontrôlable. Contre Chelsea, les policiers semblent être intervenus pour interdire les provocations entre supporters locaux et visiteurs. Mais le recours aux forces de l’ordre et aux gaz lacrymogènes là où une vitre ou des stadiers auraient suffi est symptomatique.
Le supportérisme organisé est à un tournant historique en France avec des tensions très fortes et un nouveau projet de loi qui renforce la répression. Cette approche est-elle liée ce moment historique et à l’orgnisation de l’Euro 2016?
Oui, certains politiques se servent de l’Euro 2016 pour mettre en place des mesures à l’encontre des supporters. L’Euro n’est pas la raison du renforcement de cette répression, il n’est qu’un prétexte. Depuis 1993, les textes prévoyant un renforcement de la répression s’accumule sans que cela ne soit justifié ni par des incidents graves, ni par une hausse des problèmes causés par des supporters. C’est du dogmatisme pur venant de certaines personnes au sein de l’Etat qui considèrent que gérer les manifestations sportives est une charge inutile. Ils préfèrent un football sans supporters pour ne pas avoir à gérer les déplacements de supporters.
Ce qui est incohérent en France, c’est qu’on est incapable de gérer le déplacement d’un millier de supporters sur le territoire national alors que nous sommes à 100 jours d’accueillir une compétition européenne qui va drainer des millions de supporters dont certains beaucoup moins tendre que les Français. La dernière proposition de loi invoque l’Euro mais ne fait que donner des pouvoirs aux clubs…qui n’interviendront pas à l’Euro. C’est toute l’hypocrisie de ce discours.
– Je voudrais revenir sur le PSG, car ce club s’est fait connaître par le plan Leproux qui a mis fin au supportérisme organisé et n’a pas suivi les sentences du Conseil d’Etat à propos du “Fichier Stade”. Peux-tu nous expliquer comme le PSG a fait dissoudre les association de supporters, créé la vente aleatoire des billets et créé une black list avec l’aide de la police ? Cet exemple a été suivi par d’autres club français?
Le PSG a travaillé main dans la main avec le Division Nationale de Lutte contre le Hooliganisme (Ministère de l’Intérieur) pour imposer toutes ces mesures. Ils se sont servis du décès d’un supporter pour stigmatiser les 13.000 abonnés dans les virages et toutes les associations de supporters. S’il fallait nécessairement agir puisque la tension entre certains supporters a conduit à un décès, ce Plan ne devait être que temporaire et seuls les coupables devaient être punis. Au final, c’est devenu un instrument pérenne anti-associations de supporters au service d’une explosion des tarifs dans le stade.
Le PSG a beaucoup été aidé par la police, comme le démontre cette enquête de Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/france/051113/quand-la-police-aide-le-psg-trier-ses-supporteurs?onglet=full
– Les attentats à Paris, l’état d’urgences et les lois contre le terrorisme « justifient » une répression accrue sur les droits des citoyens. Est-ce également le cas dans les stades et pour les supporters de football ?
C’est particulièrement le cas dans les stades. Depuis le début de l’état d’urgence, il y a eu 180 matchs pour lesquels les pouvoirs publics ont interdit ou restreint les déplacements de visiteurs (contre 39 fois pour toute la saison précédente).
Il y a aussi des arrêtés des Préfets interdisant aux supporters de se retrouver en centre-ville par exemple pour boire des bières.
– La France c’est le pays de la “liberté, de l’égalité, de la fraternité”, dans le Monde. Mais ces principes, surtout liberté et égalité, sont au jour le jour théorique pour le supporter de football. Penses-tu qu’il soit juste d’échanger ces droits pour la sécurité ?
Tout est question d’équilibre à trouver entre la sécurité et la liberté. Aujourd’hui, en France, on ne se pose pas cette question : on interdit les supporters par principe.
Comment expliquer qu’on interdise le déplacement de 20 supporters de Grenoble en quatrième division alors qu’on accueille des millions de supporters européens dans 3 mois ?
Comment expliquer qu’on demande à 50 policiers d’être présents à l’aéroport, d’arrêter et de mette en garde-à-vue 14 supporters nantais munis de billets à la descente de l’avion en Corse parce qu’ils vont à un match de football malgré une interdiction de déplacement ? Il aurait suffi de 4 policiers pour encadrer l’accès au stade de ces 4 supporters pendant 2 heures. Là on a mobilisé 50 policiers pendant une journée pour surveiller un aéroport, arrêter 14 supporters et interroger pendant des heures ces 14 supporters.
– Ces abus de pouvoir de la part du gouvernement et des forces de l’ordre, traditionnels dans les stades, sont-ils également désormais appliqués à la société dans son ensemble ?
On voit de plus en plus les hommes politiques s’inspirer de la répression des supporters pour d’autres cas. On lit souvent à l’Assemblée Nationale des textes expliqués ainsi : “Comme cela existe pour les supporters de football, je propose d’interdire d’accès aux métros les personnes condamnées pour fraude”, “Comme cela existe pour les supporters de football, je propose d’interdire d’accès aux salles de concert les personnes condamnées pour terrorisme”…
– Les médias devraient être les garants de la justice et l’ennemi des injustices. Par contre souvent ils se mettent au service du pouvoir, des plus puissants. Est-ce le cas en France également ou le traitement médiatique de ces affaires sont-elles équilibrés et justes ?
Depuis un ou deux ans, le gros travail des associations de supporters, grâce aux victoires en justice, a permis à certains médias de prendre conscience que les sources policières ne correspondent pas toujours à la réalité. De nombreuses enquêtes ont été menées par des journalistes et elles ont démontré de graves abus contre les supporters. Désormais, le traitement médiatique est bien plus équilibré et l’on peut trouver des articles objectifs comme des articles à charge.
En revanche, il y a encore 3-4 ans, dès qu’on parlait des supporters dans les médias, c’était pour les traiter de hooligans ou d’abrutis alcooliques.
– A part la solidarité réciproque (même en France, il y a eu différentes banderoles pour votre situation) comment le mouvement ultras français essaye de lutter contre ce situation? Il y a une unité entre les groupes? Quels moyens pouvez utiliser dans cette lutte et avez obtenu des résultats ou croyez-vous qu’il soit possible d’en obtenir ?
Concernant la solidarité pour les Red Tigers de nombreuses banderoles ont été déployé au sein des tribunes françaises et ceux peu importe le contentieux qui existe, ainsi qu’en Italie de la part de nos amis de Mantoue. Un communiqué commun signé par l’ensemble des groupes ultra français a également était diffusé. Le mouvement français a muri. Les groupes sont conscients que l’un des moyens de lutter est de faire face ensemble. Le mouvement ultra a des défauts mais également des qualités, la solidarité en fait partie.
Les groupes français commencent à se réunir au sein de l’Association Nationale des Supporters, créée en 2014. Elle compte une quarantaine d’adhérents ou partenaires.
Avec cette association, on a eu des victoires juridiques qui ont permis de la légitimer.
Surtout, l’ANS a développé un immense travail de fond avec tous les acteurs : Fédération, Ligue, Clubs, Police, Ministère des Sports, Elus politiques, médias… Elle explique tout avec pédagogie en expliquant que la solution première, c’est le dialogue. Elle construit donc ce dialogue avec un maximum de protagoniste.
C’est un travail énorme et qui prend du temps, mais les avancées sont nombreuses.
Il faut continuer à faire preuve de pédagogie dans les médias, avec les directeurs de la sécurité des clubs, avec les responsables locaux de la police, avec les parlementaires…